En écho à l'article sur le salaire d'une femme au foyer aux USA
Détail amusant aujourd’hui:
à propos d’un artiste américain, Edward Hopper, qui a, par un curieux
hasard, suscité le même intérêt au même moment dans nos blogues
respectifs, Kate (blogue ici) me donne ce commentaire :
” Je ne sais pas trop où poster ce que je souhaite dire donc je le fais ici. J’ai entendu ce matin à la radio qu’une société d’études américaine avait calculé le salaire moyen annuel d’une FAF, en se basant sur une population et les tâches diverses accomplies par 40.000 FAF. Selon celle-ci, une FAF travaillerait 92h / semaine, ce qui lui rapporterait un salaire annuel de 138.095 dollars contre 89.200 dollars pour un responsable marketing d’une société.
C’est en tous cas, une belle reconnaissance pour les FAF : leur travail est enfin reconnu et considéré comme tel, ce que trop de gens ont tendance à oublier! ”
Merci Kate pour ces données statistiques !
Je ne sais pas si mon balai doit logiquement me rapporter un salaire
annuel de 138095 dollars, je pense plutôt que ce devrait être 138095
dollars et 07 cents pour être totalement exacte dans mes calculs…
Enfin disons que la somme de 138100 dollars est le plafond en fin de
carrière, et comme la carrière d’une FAF ne prend jamais fin, notre
salaire se profile en courbe asymptote tendant vers cette limite,
n’est-ce-pas ? !
Le
salaire ne veut rien dire, mais un peu de reconnaissance ne ferait pas
de mal, il est vrai. Elle apporterait du beurre dans les épinards de
notre conscience !
J’évoquai en blaguant, un de ces jours derniers, l’hypothétique rédaction de mon CV.
Ce n’est pas parce que je n’ai jamais écrit de CV de ma vie, que je n’ai pas travaillé.
Si, si, j’ai travaillé, pendant deux ans, mais comme je suis mère au
foyer, on ne me l’a jamais demandé, on suppose que je n’ai jamais été
salariée.
Frantisek Kupka, musée national d’art moderne, Paris
On suppose que tous les livres que je lis sont des ouvrages culinaires .
C’est le détail le plus gènant de notre situation, à mon avis : on pense que la FAF n’a aucun autre passé que son foyer, car on ne peut pas concevoir qu’elle ait pu choisir cette vie recluse après avoir vécu autre chose.
Je n’ai pas eu besoin de rédiger de CV , car j’ai
vécu une époque bénie, durant laquelle les professeurs des écoles ou
des universités embauchaient ou faisaient embaucher certains de leurs
élèves, d’une manière simple et sans paperasse. Le fait existe encore
mais il est rare.
J’ai donc travaillé dans un cadre exceptionnel et unique au monde,
j’avais une chance inouïe, et … patatra … une fois mariée, j’ai enfin
rédigé un papier, ma lettre de démotivation !
John Everett Millais, aquarelle conservée au musée de Birmingham
J’ai démissionné à la naissance de mon premier bébé parce que l’appel de l’enfant fut bien plus fort que le reste.
Folie pure, il fallait oser écouter ses instincts, j’avais tout de même
la chance d’avoir ce choix en face de moi, j’aurais pu être
matériellement contrainte de travailler en dehors de mon foyer.
Comme toute femme au foyer qui a fait ce choix, j’ai quitté le monde du travail pour un monde parallèle, obscur, glauque, sujet à toutes les critiques, quasiment virtuel, car dans la réalité quotidienne , la FAF n’existe pas. Pas de numéro de sécurité sociale, quasiment pas d’identité, nous ne représentons plus qu’un lien vers le mari, vers les enfants.
En résumé, nous ne sommes plus qu’un adjuvant, même si on se veut adjudant dans notre foyer.
Nous avons beau être ” best ” en tout, cuisine chinoise, philosophie kantienne, haute couture, physique quantique, ménage express, littérature anglo-saxonne, etc … on ne nous sortira jamais de cet univers clos et limité où l’on nous cantonne.
John Everett Millais, musée d’Aberdeen.
Comme je viens d’évoquer Millais grâce à Dourwac’h ( blogue ici ) , je l’ai choisi pour illustrer mon propos.
Heureusement les artistes se sont souvent intéressés à nous, les FAF, se sont penchés avec tendresse sur les housewives qui ne sont pas si desperate que ça, et nous ont donné de merveilleux tableaux, qui permettent aux FAF de bloguer, papoter, s’exprimer, s’extérioriser quoi !
Merci à Grillondufoyer