L'agriculture au féminin
Merci à Chantal et Bernard de nous autoriser à publier leurs témoignages, découvert au hasard de la "blogosphère" par Enid.
Laissons leur la parole :
Il est bien loin le temps où la femme de la ferme avait un rôle plutôt
ingrat. En général, c'est elle qui s'occupait de la basse-cour, des
chèvres, de traire la vache laitière et conditionner le laitage quand
ce n'était pas soigner les cochons.
Mais elle devait aussi tenir la maison sans confort ni modernisme, s'occuper des enfants et nourrir une maisonnée importante. Souvent elle devait cohabiter avec ses parents ou beaux-parents,un beau-frère, des commis,etc. Les sorties étaient très espacées car il n'était pas rare qu'elle n'ait pas le permis de conduire.
Comparer ce mode de vie que j'ai connu dans ma jeunesse avec celui d'aujourd'hui, c'est vraiment sauter du coq à l'âne. Maintenant la femme du paysan veut travailler à l'extérieur, avoir son indépendance, son salaire, sa voiture,symbole de liberté.
Il n'y a guère que les gens de mon âge qui ne soient pas touchés par ce phénomène et rares sont les exceptions dans la jeune génération. Toutefois on commence à voir des jeunes femmes motivées, diplôme agricole en poche, revenir à la terre et assumer le travail d'agricultrice à part entière. Et c'est tant mieux.
Pour ma part, je me dis que pour
travailler à l'extérieur, il faut que le jeu en vaille la chandelle.
Enlevés les frais de déplacement depuis nos fermes isolées,enlevés les
frais de garde des enfants, si l'activité n'est pas largement rémunérée
il ne reste pas grand chose à la fin du mois.
Et c'est sans compter l'absence de productions vivrières, les bons produits fermiers, derniers privilèges de la vie à la ferme. Mais de toute façon, pour certaines, l'important est de vivre comme leurs amies aux moeurs citadines.
A contrario si le salaire est conséquent il est parfois le bienvenu pour pallier au surendettement de l'exploitation agricole du jeune mari installé depuis peu. Chez certains c'est tout simplement une source de revenus complémentaires. Quoiqu'il en soit cette façon de faire a sauvé du célibat bien des gars de nos campagnes.
Pour moi, quand l'épouse est partie la plupart du temps c'est la maison, la ferme,qui perd un peu de son âme. C'est une situation que je n'ai jamais connue et que je n'aimerais pas connaître.
Chantal est toujours restée et je pense qu'elle n'a pas été si frustrée que ça et je vais lui laisser raconter sa façon de vivre à "la ferme en Bourgogne".
Témoignage de Bernard (mari de Chantal)
Ah ! La vie à la ferme ! Je peux vous en parler !!!! Mais à ma façon.
Et bien moi je suis une femme au foyer bien de chez nous. Arrivée à Vernois à dix neuf ans (encore une gamine!).......bien que née à une quinzaine de kilomètres dans une ferme, je ne connaissais pas grand chose de la vie.....
A Vernois j' ai trouvé des beaux parents charmants, un beau frère encore enfant et une grand-mère de quatre vingt dix sept ans. Imaginez la situation!
Nous logions tous sous le même toit. Il fallait bien quand même faire sa place .....Ce fut un peu éprouvant mais quand on est jeune!.....
Je travaillais à Autun mais mon instinct maternel à remporté et j'ai élevé mes enfants "tant bien que mal".
Puis il a fallu grandir, mûrir, ça la vie s' en charge! Les bons conseils d'une belle-mère presque parfaite (cuisinière,ménagère etc...) j' en ai appris des choses au près d'elle environ deux ans.
Puis je me suis mise à tenir une petite basse-cour (volailles,chèvres,etc...)
Et nous voici en 2007,contrairement à ces femmes qui travaillent à l' extérieur, je gère mon temps, mes rendez-vous, même l' imprévu. Je suis disponible pour les courses "genre"aller chez le vétérinaire, chez le mécanicien, manipuler les bêtes à l' occasion (pas les taureaux, bien sûr.....)
J'ai beaucoup de liberté, j'aime tricoter, faire du vélo, de la gym d'entretien .
Pas de soucis pour la scolarité des enfants (réunion de parents, grèves de train, vacances) j' étais là. Je jardine un peu, tenez sur ce je vous laisse un petit moment pour cueillir mes premières patates avec une salade du jardin et des fraises. Cela n' a pas la même saveur que les plats cuisinés de la grande surface !
Bernard apprécie beaucoup de ne pas être seul pour déjeuner. Si par hasard je m' évade une journée, il sait cuire les oeufs et dans le réfrigérateur, un petit dessert l' attend. Il adore ça ! Je suis là pour recevoir les visites, surveiller une vache qui va vêler, une présence à la ferme le sécurise s'il s' absente quelques heures.
Je vais arrêter de parler de ma vie assez banale. Vous, les femmes qui partez tous les jours de votre foyer, dites moi ce que vous en pensez et est-ce un choix ou une obligation?
Chantal, et Bernard vivent et travaillent dans une ferme d'élevage charolais traditionnel dans cette belle région du Sud Morvan.
Je vous recommande particulièrement la superbe galerie photos ICI, tout un univers que les "rats des villes" comme moi ne connaissent sans doute pas !
Encore merci à vous, Chantal et Bernard, nous serons ravis de continuer à vous lire et d'avoir de vos nouvelles ICI